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À Guingamp, la prise des repas s’adapte au résident


Publié le Lundi 28 Mars 2022 à 15:55

Depuis plus de sept ans, l’EHPAD-EHPA Résidence Kersalic de Guingamp revoit entièrement son organisation et plus largement ses pratiques. Quatre « villages » composent ainsi cet établissement qui propose plusieurs sites de prise des repas : en appartement, dans le restaurant communautaire du village ou dans une brasserie centrale, pensée comme un véritable « café de la mairie ».


« Innovantes ». Tel est le mot qui décrit le mieux les démarches entamées par l’EHPAD-EHPA Résidence Kersalic de Guingamp. Soucieuses d’améliorer leurs pratiques, les équipes de l’établissement ont en effet revu toute leur organisation : modifiant les heures de toilettes, les modalités de prise des repas, la division des espaces… En quelques années, elles ont créé un véritable bourg, composé de quatre villages et offrant des espaces de vie aux proportions variées qui « s’adaptent le plus possible aux demandes et aux situations », explique Corinne Antoine-Guillaume, directrice de l’EHPAD-EHPA Résidence Kersalic. 

 

« Tous soignants »

Passionnée de gérontologie, cette ancienne directrice d’institut de formation d’aide-soignant est l’initiatrice de ce projet lancé dès 2013. « De nombreuses pratiques ne répondaient alors pas aux besoins réels des personnes âgées. Pour assurer la prise des petits-déjeuners et la fin des toilettes le matin, certaines personnes étaient par exemple levées très tôt », se remémore la responsable qui regrette ici « un manque de sens dans la pratique des soignants ». Pour amener les équipes à s’interroger sur leur travail, la directrice enclenche dès 2014 toute une série de réflexions et de formations autour de la mise en valeur du personnel.

Passionnée de gérontologie, cette ancienne directrice d’institut de formation d’aide-soignant est l’initiatrice de ce projet lancé dès 2013. « De nombreuses pratiques ne répondaient alors pas aux besoins réels des personnes âgées. Pour assurer la prise des petits-déjeuners et la fin des toilettes le matin, certaines personnes étaient par exemple levées très tôt », se remémore la responsable qui regrette ici « un manque de sens dans la pratique des soignants ». Pour amener les équipes à s’interroger sur leur travail, la directrice enclenche dès 2014 toute une série de réflexions et de formations autour de la mise en valeur du personnel.

 

Manger chez soi, dans le village…

Mettant en application ce mot d’ordre général, les équipes de la résidence ont progressivement modifié leurs approches, changeant par là même l’organisation du bâtiment : les couloirs ont été renommés au nom de rues de Guingamp, et les étages représentent aujourd’hui des « villages ». Ces quatre ensembles correspondent à un profil pluri-pathologique particulier, permettant ainsi aux soignants de se positionner dans leur souhait professionnel. « De même, les résidents et les familles savent qu’ils peuvent changer de lieu en fonction de leur évolution. Nos habitants poursuivent leur parcours de vie au sein de la structure », complète Corinne Antoine-Guillaume.

Chaque jour, les villages s’animent donc autour d’activités communes, avec pour certains, la préparation des repas, et surtout l’épluche des légumes. Ces restaurants communautaires de quartiers permettent en effet aux soignants comme aux résidents de s’impliquer davantage dans les repas : « un bon moyen de donner de l’appétence aux plats », rappelle la responsable. Les résidents mangent ainsi avec les soignants, qui n’hésitent plus à imaginer des animations autour du repas, par exemple la préparation de paninis minute. Grâce à ces différentes actions, couplées au développement du manger main et du coupé très fin, l’établissement a réduit le nombre de mouliné, passant de vingt en 2014 à six actuellement.

« Tout cela est possible parce que notre établissement est pensé sur 24h et non sur la journée ou sur la matinée », ajoute la directrice, qui insiste sur la nécessité de laisser plus de liberté aux résidents quant à l’heure de leur toilette ou des repas. « Dans chaque village, une salle de restauration avec une cuisine est à disposition des équipes, et permet une plus grande marge de manœuvre. Les repas sont montés vers 11h30 et 18h dans des norvégiennes. La majorité des repas du soir est donnée entre 18h30 et 20h30. Mais, si cela n’est pas consommé, tout est conservé pour être donné plus tard, sur demande. L’important, après tout, c’est que les habitants mangent, quelle que soit l’heure », détaille Corinne Antoine-Guillaume. Et pour ceux qui ne voudraient pas prendre leur repas en commun, la résidence a également équipé ses chambres de 30 m2, de bouilloires et micro-ondes.

 

… ou à la brasserie

Par ce biais, l’établissement propose ainsi trois lieux de prise des repas : chez soi, dans la salle du quartier ou à la brasserie du bourg. Dernier né des trois options, ce restaurant s’intègre parfaitement dans la démarche globale lancée par l’établissement breton. Composé d’une mairie (le bureau de la direction), d’une poste, d’un point d’information, d’une salle culturelle et d’un bistrot, le rez-de-chaussée de l’établissement a effectivement des airs de bourg. Tenu par les deux cuisiniers de l’EHPAD ainsi qu’un aide-soignant, le bistrot offre aux résidents la possibilité de déguster, les midis, des repas typiques de la brasserie : carpaccios, salades, œufs mollets, pièces du boucher, galettes, andouillettes, poulet cocotte, pâtes aux quatre fromages, crumble de légumes, frites, crème brûlée…

Très protéinés, ces plats sont particulièrement appréciés des résidents comme des personnes invitées. Gratuite pour les pensionnaires de l’établissement, cette prestation reste néanmoins payante pour les personnes extérieures. Pour en bénéficier, les résidents doivent réserver et s’y rendre, « comme au restaurant » : s’habiller en circonstance, choisir les plats, inviter des personnes extérieures, voire des membres du personnel… « Il est génial de voir qu’aujourd’hui, les résidents invitent les soignants », confie, avec le sourire, Corinne Antoine-Guillaume qui constate ici une diminution des tensions et une valorisation du travail des soignants. « Les soignants ont tous un potentiel énorme, conclut la directrice. Pour qu’ils puissent offrir toutes leurs capacités, il ne faut pas les réduire à la réalisation des toilettes, mais au contraire, leur permettre de s’impliquer sur différentes tâches » pour véritablement participer à la vie en communauté.

Article publié dans le numéro de janvier d'Ehpadia à consulter ici

 

L’EHPAD-EHPA Résidence Kersalic cité en exemple

Les différents projets de l’EHPAD breton n’ont pas manqué d’attirer l’attention des médias, locaux comme nationaux. Depuis l’ouverture de la brasserie, les quotidiens régionaux Le Télégramme et Ouest France ont ainsi chacun consacré un article à l’établissement « qui multiplie les aménagements destinés à améliorer le bien-être de ses résidents », résume Le Télégramme. Journaliste au service société de France Inter, Alice Kachaner évoque quant à elle le fait-maison et la volonté « de redonner le plaisir de la table » aux 72 pensionnaires. « À la brasserie de l’EHPAD, le déjeuner s’étale sur deux heures. Chaque midi, ce petit troquet plus vrai que nature accueille jusqu'à 25 couverts et propose cinq plats à la carte », constate la journaliste en ajoutant qu’en « quelques années, la consommation d'antidépresseurs et d'anxiolytiques parmi les résidents a considérablement baissé ». Naturellement, la démarche intéresse également les professionnels du secteur. En juin 2021, la directrice et le responsable restauration de l’EHPAD prenaient ainsi la parole dans un webinaire organisé par l’Institut Nutrition. Un bon moyen, pour eux comme pour l’Institut, d’expliquer la démarche et d’illustrer les possibilités de projets à mener dans le cadre de la lutte contre la dénutrition.

 


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