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Grand Âge et Numérique : rattraper le retard français


Publié le Mardi 28 Janvier 2020 à 10:51

Réalisée en collaboration avec Capgemini Invent, expert en technologies numériques, Grand Âge et Numérique : Objectif 2030 est la troisième étude du Think Tank Matières Grises. Sur 60 pages, elle analyse les enjeux de la révolution numérique pour les structures du secteur de la prise en charge des personnes âgées, pointe le retard français et propose des pistes d’amélioration.


Grand Âge et Numérique : rattraper le retard français
« Le secteur du Grand Âge en France accuse en matière de système d’informations, sans lequel aucun accès à l’innovation numérique ne devient aujourd’hui possible, un retard coupable. » Tel est le constat de départ du rapport rendu public le 3 septembre dernier. Le « manque d’appétence » des dirigeants d’établissements médico-sociaux, et « l’insuffisant volontarisme de la fonction publique » en sont les premières causes.

Pourtant, l’informatisation représente, pour les EHPAD notamment, un levier de performance organisationnelle et opérationnelle, grâce aux gains de temps engendrés par l’automatisation de certaines tâches, à la sécurisation des informations, ou à la facilitation des échanges entre professionnels et avec les familles. Il en va de même à l’échelle territoriale. « Les SNAC favorisent en effet un accompagnement global et décloisonné de la personne âgée. Les opérateurs du grand âge ont donc tout à gagner des SNAC pour mieux prévenir et accompagner la perte d’autonomie. »



SI, un retard rattrapable

« 15 à 20 % des EHPAD seraient très mal, voire pas du tout informatisés concernant le dossier résident. » En guise d’explications, le rapport évoque les difficultés à obtenir des solutions adaptées aux besoins des structures, la faible couverture par le réseau haut-débit de certains territoires, le manque d’interopérabilité des outils existants, mais également, pour les petites structures, l’absence globale de ressources SI « capables de financer et de conduire des projets d’investissement et d’évolution des pratiques ».

Pour autant, les auteurs du rapport se veulent rassurants. Sous réserve d’une mobilisation de tous les acteurs - des gestionnaires d’établissements aux autorités, en passant pas les éditeurs de solutions - et d’évolutions technologiques et organisationnelles, les retards pris « ne sont pas inéluctables ». « L’interopérabilité, la cyber-sécurité, l’urbanisation » sont « autant de notions nouvelles, qui se doivent désormais de figurer dans le vocabulaire autant que dans l’agenda des professionnels et des pouvoirs publics ».

Un premier enjeu réside dans la définition et l’harmonisation des processus métier, en s’appuyant sur l’expérience utilisateur. Partir des besoins des professionnels et de leurs habitudes de travail est effectivement une « condition essentielle de succès de toute démarche d’informatisation ». Afin de favoriser l’interopérabilité et de faciliter l’intégration des SI au sein des établissements, les auteurs de l’étude insistent par ailleurs sur la nécessité de développer des référentiels nationaux. Pour les structures isolées ou les gestionnaires de petite taille, la mutualisation, voire l’externalisation du SI, peuvent enfin s’avérer être des paris gagnants.


Le numérique au service de la coordination territoriale

L’utilisation du numérique « constitue une condition sine qua non » d’une coordination territoriale réussie entre les acteurs du secteur, elle-même indispensable à la réussite d’une politique du grand âge. En la matière, si de nombreuses initiatives existent, le rapport n’en souligne pas moins qu’elles demeurent « inabouties, très inégalement développées d’un secteur et d’un territoire à un autre, et généralement mal identifiées par les acteurs de terrain ».

En vue d’atteindre une coordination territoriale numérique réussie, l’étude préconise donc une coopération entre acteurs, rendue possible par l’évolution des modes de financement « dans une approche moins segmentée et moins cloisonnée entre les soins de ville, l’hospitalier et le médico-social ». L’objectif final est la mise en place d’un « environnement numérique interopérable, sécurisé et urbanisé ». Pour les auteurs du rapport, celle-ci passera notamment par l'harmonisation des outils et des usages, via la création de référentiels socles, à l’image du Cadre d’interopérabilité des Systèmes d’Information de Santé (CI-SIS) développé par l’ASIP Santé.
 



Structurer l’offre digitale

Télémédecine, solutions domotiques, outils d’aide à la prévention des risques ou de préservation des liens sociaux, etc., l’étude menée par Matières Grises et Capgemini Invent s’intéresse enfin à l’émergence des nouveaux services digitaux. Premier constat : si les applications digitales sont « aussi multiples qu’utiles », leur développement n’en demeure pas moins « chaotique, inégal et désordonné ». Il persiste également « une forme de scepticisme sur la réelle valeur ajoutée de ces services ».

L’évaluation outillée du service rendu représentera donc une « composante primordiale pour garantir les meilleures conditions de passage de l’innovation à un dispositif généralisé ». L’étude rappelle ainsi les préconisations du rapport Libault concernant la création d’un centre de preuves pour les stratégies préventives, tout en indiquant qu’à terme, « une labellisation des solutions serait l’outil ultime de lisibilité et de structuration de l’offre ». La structuration du marché est effectivement un autre enjeu majeur de la généralisation de l’usage des services digitaux. « Trop d’offres tue l’offre » résume ainsi l’étude. Les auteurs appellent donc à la constitution d’un cadre législatif et réglementaire incitatif, sans être contraignant.

Reste la question des financements. « Sous peine de venir alimenter, de manière plus ou moins directe, le reste à charge, et donc les inégalités d’accès aux soins et services », le modèle est à inventer. Les expérimentations menées sur la base de l’article 51 de la loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2018, permettant de passer « d’une logique de financement des ressources à une logique de financement des résultats », pourraient ainsi s’avérer être une piste utile.

Plus d’informations : L’intégralité du rapport est accessible gratuitement sur le site du Think Tank Matières Grises : https://www.ehpa.fr/matieres-grises/